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Lundi 20 Juin 2022

Wormleysburg-Harrisburg, Pennsylvanie, USA
Carlisle, Pennsylvanie, USA
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33
Kilomètres

Jour 15


Je passe ma journée sur la 641 West. Cela commence plutôt bien, il y a des milliers de choses à regarder et des espaces sont faits pour les piétons. Ils sont toujours fabriqués de la même façon ces trottoirs très rarement empruntés. Des carrés de béton posés les uns à la suite des autres. Werner grogne souvent, il bouge beaucoup. Eh oui, les arbres reprennent le dessus, les racines déforment et soulèvent les plaques. C’est sportif. Je l’aide à la force de mes bras. On traverse Mechanicsburg. C’est la classe ce nom de ville. Hélas, il n’y a pas de tatoueur, et de toute façon nous sommes un lundi matin tôt. Tout est fermé dans cette jolie petite ville pleine de restaurants, de bars qui ont l’air bien sympathiques quand ils sont ouverts. J’aurais bien mérité un tatouage Mechanicsburg, après tout j’ai largement dépassé les 200 miles depuis mon départ. La 641 West devient moins attractive puis carrément horrible. De longs no man’s land puis des champs cultivés à perte de vue. Je regarde mes pieds qui avancent sans que je doive y penser et aussi mon ombre avec ce chapeau ridicule. Je fredonne les Talking Heads souvent, We're on a road to nowhere
Come on inside
. Je réfléchis aussi à de futures pièces, parfois je suis juste vide. Et ce n’est pas si mal. Je fais une petite pause quand je trouve de l’ombre. Je regarde les camions géants passer. Et les motards avec de la musique très forte diffusée depuis leur réservoir. Ici il y a des mouches qui ressemblent traits pour traits à celles de chez nous, sauf qu’elles mordent. Et ça fait de grosses cloques qui grattent très fort et très longtemps. Elles m’adorent. Ce sont peut-être des taons super intelligents qui se sont déguisés en mouches pour se la jouer discrets. Tout est possible ici. La terre peut même être plate.
On est d’accord que je ne vous parle pas des animaux morts au bord de la route. Non parce que parfois ils ont des postures effroyablement tragiques. Bon d’accord, on n’en parle pas. Après des kilomètres de champs, j’entre dans Carlisle. J’y fais un énorme détour pour aller voir un tatoueur qui semble ouvert. Raté, la boutique est à vendre. Bon, je pensais que se faire tatouer dans ce pays serait plus simple. En fait tout ce que j’avais supposé être simple ne l’ai pas. Trouver à manger, trouver où dormir, trouver où pisser. Et ce n’est que le début. Après l’étape ratée chez le tatoueur j’ai encore 3 bons kilomètres zombies pour arriver au motel que j’ai repéré. Et là je craque, je fais une folie, un acte odieux, je mange une énorme part de frites et bois un coca dans un Mac Donald. Tant qu’à bien se nourrir, allons y. Il n’y a rien d’autre alentours et je ne m’étais nourrie aujourd’hui qu’avec les barres de céréales volées à l’hôtel chic. Mon motel Super 8 arrive. Au bord d’une autoroute bien sûr. La dame de l’accueil, qui a des pieds et des chevilles enflées comme des pastèques et un œil qui regarde toujours ailleurs, me parle longtemps de mes tatouages, elle n’en a pas. Si elle se marie, elle aimerait des alliances tatouées. Oui madame bonne idée. Je file me plonger dans un bain. Ma peau ressemble à une chips grillée.

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Dimanche 19 Juin 2022

Mardi 21 Juin 2022

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La publication de ce journal est une commande du FRAC Bourgogne dans le cadre de son projet sur le récit et ses formes.

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