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Jeudi 4 Août 2022

Vandalia, Illinois, USA
Greenville, Illinois, USA
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28,4
Kilomètres

Jour 60

J’adore ce trip ardu car les journées peuvent commencer en bad absolu et finir en ultra kiff.
Bon, le « petit bonheur » d’hier soir n’a pas duré bien longtemps. Je n’ai pas dormi sous ma tente. L’orage qui est arrivé était violent avec une nouvelle alerte inondations qui fait biper ton téléphone. Donc j’ai été direct rapatriée chez Jo. On a longtemps discuté politique. Elle m’a expliqué pourquoi elle vote Trump. Je raconterai tout cela de vive voix quand je serai invitée pour des conférences ou des discussions. Je ne voudrais pas plomber l’ambiance. Me voici donc dans un grand salon, disons, chargé, avec la tv allumée direct. Je vais dormir sur le canapé. Werner est dans le garage et ma tente dans la tempête. Je ne réussis pas à dormir, anxieuse de ce que j’entends à l’extérieur et des flashs qui éclairent toute la pièce. J’imagine ma tente s’envoler. À 4h je suis habillée et je pars avec ma lampe de poche essayer de retrouver dans quel corps de bâtiments on a mis Werner. Je me perds un peu, c’est un labyrinthe. Je le retrouve et l’emmène sous l’abri à côté de ma tente. La nuit est encore profonde. Je dois allumer la lumière du toit de taules pour dé-pitcher ma tente qui a vaillamment tenu le coup. Le temps de tout ranger, le jour se lève à peine et je suis attaquée par des dizaines de moustiques pratiquants affamés. Dès que je distingue la route, je commence à marcher sous une pluie battante. Le ciel pèse et surexcite les mouches d’orages. Elles me dévastent des doigts aux creux poplités (j’adore ce mot). Cela fait un mal de chien (même si j’adore les chiens et ne comprends pas cette expression).
La première partie du trajet se fait sur une petite route de campagne sans intérêt. De toute façon il pleut tellement que je ne vois rien. La pluie se calme quand j’arrive sur la 40 bien défoncée sur cette partie du trajet. Beaucoup de champs et de forêts sont inondés. Trois gros rapaces font sécher leurs ailes sur un arbre mort. J’ai hâte d’arriver à ma destination du soir pour pouvoir en faire autant. Je fais une pause dans une station-service car je n’ai rien mangé depuis 24 heures. Hier on m’a collée sur le canapé à 18h et on m’a dit bonne nuit. Mes maigres provisions restantes étaient restées dans Werner. Et ce matin, trop d’attaques des missionnaires de Jésus pour envisager un petit déjeuner. Le soleil pointe le bout de son nez et il fait directement tropical. Je chante en boucle toute la journée une phrase d’une chanson des Monty Python : « Life's a piece of shit, When you look at it ». Je regarde régulièrement derrière moi pour voir si les nuages ne vont pas me faire un sale coup. Car la météo prévoyait de la pluie et des éclairs toute la journée. Il fait juste chaud à en crever. À 1h de marche de mon étape du soir, je retire la protection de pluie de Werner pour avoir accès à ma casquette que je ne pensais pas utiliser aujourd’hui. Le challenge est d’arriver au motel avant l’orage. Lydie 1 - Orage 0.
Ma mission une fois arrivée est de trouver quelqu’un pour un drive de quelques miles demain matin. Car direction ouest, il n’y a absolument rien pour dormir avant 54 kilomètres. Juste un camping pour camping-cars qui a refusé malgré mes nombreux arguments de m’accueillir (l’échange via Facebook s’est fini en insultes). Donc, comme je suis incapable de marcher 54 kilomètres en une journée, et qu’avec ces alertes météo je ne prends pas le risque de me retrouver sans toit, il faut que quelqu’un me rapproche en voiture. C’est la seule solution, il n’y a aucun transport en commun. J’explique mon affaire à la réceptionniste du motel qui kiffe immédiatement mon projet (ma carte avec les gommettes fait de l’effet). Elle me dit de revenir 1h plus tard, elle aura alors un ami qui pourra peut-être m’emmener. Je profite de ce temps pour tout faire sécher dans la chambre, même mes papiers importants sont imbibés. Et je fais une lessive. L’ami en question ne peut pas, ils se démènent tous pour me trouver une solution. Ils téléphonent à un ami commun pour qu’il vienne me rencontrer. Quand il arrivera, on m’appellera dans ma chambre. Et je rencontre Terry. Il est à la retraite. Il était maçon, mais il ne peut plus travailler avec ça, dit-il en me montrant son gros bidon. Il est OK pour me déposer à mi-chemin demain matin. Et cela gratuitement. Il est très curieux des raisons de mon projet. Je lui raconte tout, et quand il me demande ce que je fais en tant qu’artiste, je lui dis que je suis photographe (c’est plus facile). Et là il me dit qu’il peut me donner du matériel pour un studio photo complet. Je lui demande pourquoi il a tout cela. Et c’est là que commence une discussion que j’adore. Pendant longtemps il a pratiqué le Storage Hunter (il y a une émission télé qui suit des gens qui ont cette pratique). Pour 250 dollars, tu ouvres au hasard les portes d’un container abandonné, et tout ce qui est dedans est à toi. Il a gagné beaucoup d’argent ainsi. Parfois tu tombes sur un stock d’écrans plats dernier cri, ou des montres de luxe, des ordinateurs, des meubles… tout est possible. Tu peux aussi trouver juste un tas de trucs pourris et c’est à toi de tout vider. C’est la loterie. J’adorerais faire ça. On se donne rendez-vous à 8h demain matin et Check des 2 poings. Bain et soin de la quinzaine d’impacts géants sur ma peau. À part ça, tout va merveilleusement bien !!

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Mercredi 3 Août 2022

Vendredi 5 Août 2022

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La publication de ce journal est une commande du FRAC Bourgogne dans le cadre de son projet sur le récit et ses formes.

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