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Dimanche 3 Juillet 2022

Belle Vernon, Pennsylvanie, USA
Bentleyville, Pennsylvanie, USA
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20,3
Kilomètres

Jour 28

Ce matin avant de trouver le courage d’entreprendre cette nouvelle journée, j’ai reçu de beaux et doux mots de personnes que j’aime et aussi d’inconnus qui suivent la route de Nulle part. Cela donne de la force. Je souffre du manque de convivialité. J’espère chaque jour faire des rencontres joyeuses et enrichissantes.
Traverser puis sortir de Belle Vernon est très agréable. Rivière, ancien site industriel, vieux ponts impressionnants, train. J’adore. Après une longue ligne droite (certaines motos font un son à en faire exploser les tympans lorsqu’elles accélèrent) je traverse la rivière Monongahela. Je prends mon temps, je marche tranquille, je profite un long moment du doux vent sur le pont. Juste après je me prends une bonne montée qui fait suer tous les pores de la peau. Lorsque je traverse des bouts d’ombre, je les savoure avec volupté. Je bifurque sur une petite route, cela commence par de jolies propriétés aux pelouses plus grandes que des stades fraîchement tondues, puis cela s’enfonce dans la forêt avec une côte qui monte à pic. Werner me semble plus lourd que jamais. Un pas après l’autre je réussis à nous hisser péniblement jusqu’en haut. Je ruisselle dégouline agonise. Je m’assieds carrément sur la route pour reprendre mon souffle et mes esprits enfuis. La vue est belle. Je contemple longuement les montagnes qui se confondent avec le ciel à l’horizon. Cette pause calme me rend sereine. Je suis assez fière d’avoir passé les Appalaches même si sur la carte sur laquelle j’inscris mon trajet cela ne fait que quelques centimètres. Chacune de mes journées se mesurent en millimètres.
Pour info, juste comme ça, en voiture, en roulant bien, on arrive Nulle part en 2 jours depuis New York. Ce que j’ai fait en 28 jours c’est juste 6 heures tranquille en pick-up sur les autoroutes. Mais le temps des pas est précieux. Mesurer ce pays à l’échelle de mon corps me rend plus que jamais vivante et combative. La marche se poursuit de colline en colline puis plonge dans la forêt. Un cycliste tout équipé pour une compétition s’arrête à mes côtés et me demande sur quelle route nous sommes. Je fouille mon gps et lui donne sa réponse. Je m’apprête à entamer une conversation, le temps que j’ouvre la bouche, il est déjà reparti sans que j’aie le temps de dire un mot. Mais parlez-moi, parlez-moi ! Je n’en peux plus de ce manque de curiosité, d’échange, de politesse même. America Great again.
Rectification, on tond les pelouses le dimanche également. Après encore un moment dans la forêt, je bifurque et arrive direct sur des nœuds autoroutiers. Un petit cimetière est coincé au milieu d’un échangeur. Mon motel n’est pas loin dans une zone vide. Dans une station-service j’offre une parure à Werner. Un autocollant Pennsylvania. Il est tout content. Après toutes ces montagnes, il l’a bien mérité. Une douche et Rocky on tv. What else ?

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Samedi 2 Juillet 2022

Lundi 4 Juillet 2022

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La publication de ce journal est une commande du FRAC Bourgogne dans le cadre de son projet sur le récit et ses formes.

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