Jour 54

Qu’on se le dise, échappatoire impossible, la 40 West va me coller aux semelles jusqu’à Saint-Louis. Alors il ne faut pas trop réfléchir ce matin pour s’atteler à Werner. Je quitte la ville au lever du soleil et traverse la rivière Wabash. Le chemin se fait pendant un moment sur une petite passerelle en bois qui longe une réserve naturelle. Il y a beaucoup d’oiseaux, c’est somptueux pour débuter la journée. La 150 West rejoint ma 40 West chérie. Et c’est parti tout droit. Je peux un moment m’échapper par la vieille route 40, la route historique, la vraie. Je croise Mike, qui s’arrête exprès pour discuter avec moi et prendre des photos de Werner qu’il trouve extraordinaire. Il connaît bien la route jusqu’en Oklahoma parce que ses enfants habitent en Californie. Il y va souvent. Je reprends la marche et Mike s’arrête à nouveau un peu plus loin pour me donner une boisson énergisante. Pour me donner de la force me dit-il. C’est adorable mais imbuvable. Il me confirme que dans quelques centaines de mètres, je vais passer en Illinois. Et je vais changer de fuseau horaire. Ma journée sera plus longue d’une heure. Lorsque Mike va en Californie, il gagne 3 heures. Je prends le temps de faire une photo avec un pied dans chaque État. Et je retrouve la 40 avec le sourire. Entrer dans un nouvel État, même si la route file toujours vers l’infini, cela me rend euphorique. J’ai le sentiment d’avancer. Même la 40 ne me semble pas désagréable, il y a parfois peu de circulation, j’ai un grand espace en graviers pour marcher, je finirais presque par aimer cette route. De toute façon, je n’ai pas le choix. J’arrive à mon étape du soir un peu tôt à cause de cette histoire de changement de fuseau horaire. Le village s’appelle Marshall. Mais la 40 me fait l’éviter par la droite. Une pancarte indique avec fierté qu’à Marshall on peut admirer le plus gros marteau du monde. Je décide de ne pas faire 5 kilomètres de détour pour le voir (Je sens que vous êtes déçu.e.s). Je préfère faire un détour pour aller dans un supermarché afin de me nourrir correctement quelques jours. Après une station-service dans laquelle je m’offre un smoothie qui me sert de petit-déjeuner après plus de 5 heures de marche, je bifurque au nord par la 1 Illinois pour arriver à un Walmart. Et là c’est la fiesta. Je remplis Werner de futurs repas qui tous me font envie (et je craque sur des chaussettes E.T. à 3 dollars, pardon). Mon motel est comme toujours perdu dans une zone sinistre. Mais les raviolis aux légumes sont succulents. Et j’ai du temps pour un long bain et une recherche des étapes suivantes puisque j’ai 1 heure d’extra balle en plus.