Jour 46

J’écris ce texte dans les toilettes climatisées du camping tellement la chaleur est étouffante. C’est irrespirable. Et cette nuit, la température ne va pas descendre sous 26. Cela ne va pas être une nuit facile. La dernière n’était pas mal non plus. J’ai bataillé des heures avec un raton laveur qui volait ma nourriture dans le ventre de Werner. Il a réussi à ouvrir la fermeture éclair ce petit andouille. Je l’entendais croquer dans mes chips de riz. Puis quand j’ai tout planqué en hauteur, il tournait autour de la tente en soupirant (c’est l’effet que cela faisait). Oui, j’ai décidé de rester une journée de plus près du lac. J’étais au rendez-vous pour le lever du soleil, en faisant une petite marche jusqu’au barrage. De retour sur mon camp, je me suis lavé les dents en compagnie de biches, et je me suis rendu compte que j’avais même accès à l’électricité. Parfait pour recharger le ventilateur qui a tourné toute la nuit. Pour continuer à arpenter le park, j’emprunte la route qui monte aux lodges de luxe. Cela me permet d’autres points de vue sur le lac qui se prolonge beaucoup plus loin que ce que je voyais hier. Dans le lodge imposant, il y a aussi un restaurant dit « gastronomique ». Je n’ai plus grand chose à manger de mangeable, je m’offre donc un petit déj. On met les cuisines en marche pour moi, il n’y a absolument pas de clients. C’est Shininguien. C’est compliqué la cuisine dans ce pays. Mon veggie burrito est infect. Je passe le reste de la journée dans l’eau ou à faire la sieste. Tim et Jerry passent me voir pour me donner de l’eau et de la glace. Cette fois, ils prennent du temps avec moi et sont curieux d’en savoir plus sur mon périple. Je raconte et montre ma carte. Ils sont impressionnés et demandent si j’écris mon aventure. Oui, et vous serez dedans. On parle des animaux et de la beauté de ce park. Je leur dis qu’ils ont le meilleur job que l’on puisse avoir. Ils sont alors fiers et remontent leurs épaules dans leurs tenues beiges. Yes, always in the wildlife. Ils sont fabuleux. En partant, Tim met sa main sur son cœur et me dit qu’il pensera à moi pour mon arrivée dans quelques jours. Il m’offre une phrase que j’adore : LIVE IT ! J’ai droit à un hug géant. Inoubliable. Je retourne à mon lac. Je nage un petit moment à côté d’une tortue. Elle tend sa petite tête hors de l’eau avant de plonger. Je n’avais jamais vu une tortue nager en liberté. C’est très émouvant. À plusieurs reprises dans le ciel, passent de très gros avions. Je n’en ai jamais vu de semblables. Je me demande ce que cela transporte (peut-être qu’il vaut mieux ne pas savoir). Ils sont gris avec juste une ligne jaune au-dessous. Ils volent très bas, beaucoup plus bas que les vautours qui eux, sont à une altitude impressionnante. La vue qu’ils doivent avoir doit être prodigieuse. Je les envie. Les regarder se laisser planer sans fin dans les courants d’air au coucher du soleil est un spectacle en soi. Quand je serai grande, je veux être ranger dans un park américain ou vautour. (Et je réponds avant que quelqu’un ne me dise mais les vautours ne sont pas végétariens ou véganes : les vautours ne pratiquent pas l’élevage et l’abattage industriel.)

Nowhere is my future.