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Springerville, Arizona, USA
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A One Lake Campground, Arizona, USA

Mardi 25 Juillet 2023

38,7
Kilomètres

Jour 24


Les écureuils se sont donné le mot. En fin de soirée, c’était pour eux la prise de la glacière. J’ai dû user de ruses. J’ai tout enfermé dans un tote bag, et j’ai copieusement aspergé le tout de produit antimoustique. Ça a presque marché.

La nuit était curieusement silencieuse, extrêmement silencieuse, un silence gigantesque. Pas de vent, pas de grillons, vide sonore. Ce qui fait que quand il y avait un son, il était particulièrement inquiétant. Je me suis endormie assez tôt et me suis réveillée à 1h44. Je suis allée pisser, le ciel était absolument grandiose. Constellé de millions d’étoiles, c’était sublime au travers des arbres. Mais dans la nuit noire et muette, je n’étais pas spécialement rassurée. Je me suis glissée à nouveau dans mon sac de couchage, et il y a eu un son très étrange. Un cri rauque, fort et long. Je me sentais minuscule. Pas facile de se rendormir après cela. J’étais plutôt aux aguets. Pendant longtemps, il y a eu à espaces réguliers et de plus en plus proche, le hululement d’une chouette. Je me suis dit que les petits écureuils affamés de bouffe industrielle ne devaient pas en mener large. Enfin est arrivée l’aube et j’ai tout re-empacté. Et j’ai repris la 260 qui monte encore et encore, soleil qui tabasse de face dès mes premiers pas à 6h30. Enfin arrive un plateau. Une station de ski. Les arbres se font plus rares. J’implore ma bénédiction pour que cela redescende ensuite. J’ai l’honneur de voir deux jeunes cerfs, des frères peut-être, qui m’observent depuis une immense prairie jaune. Sur cette plaine, je quitte le territoire apache. Et enfin arrive la descente. Je mets ma playlist préférée pour accompagner mes pas et mes fessiers qui travaillent. Werner me pousse gentiment. Évidemment, plus je descends, plus il fait chaud et lourd. L’ombre a cessé d’exister. Je retrouve le réseau téléphonique. J’appelle mes proches pour les rassurer. Régulièrement, Werner et moi faisons des « pop » sur la route. Nous éclatons des bulles de goudron chaud. Je vois mon premier coyote, il est explosé sur le bord de la route. La rudesse de l’affaire est compensée par la beauté du paysage. À ma droite, ce sont encore les montagnes, vertes de grands pins, à ma gauche, un désert d’herbes jaunes et de formations rocheuses ocres. Et un ciel américain, soit des nuages parfaitement parallèles au sol sur fond de ciel bleu. La descente devient un plat, une route qui part vers l’infini avec au bout mon étape du soir. Ma réserve d’eau est quasi épuisée. Je me restreins. Je rêve d’un Coca Cola qui booste. Mais rien avant l’horizon. Plus j’avance sur cette route, plus la ville recule. Il y a un dôme blanc au centre, facile à repérer, mais je vous assure qu’il semble toujours plus loin. Je peine sévère. Heureusement, les nuages se sont resserrés et font de l’ombre sur le plateau. Cela m’empêche de cuire sur pied. Le vent se lève, chaud et de face bien sûr, et le ciel gronde. De plus en plus. J’active le pas et le turbo zombie. Il commence à pleuvoir. De grosses gouttes qui ne rafraîchissent même pas. Je ne regarde pas les éclairs au loin. Je sais que je dois quitter enfin la 260 pour trouver mon motel. J’active alors mon GPS, fournis les derniers efforts uniquement motivés par l’idée d’une douche et d’enfin boire de l’eau fraîche, et arrive au motel. La dame de l’accueil ne trouve pas ma réservation effectuée lorsque j’ai retrouvé du réseau. Je lui montre le mail de confirmation, et en fait, je ne suis pas dans le bon motel. Quelle andouille. Je me disais bien en arrivant que ça avait la classe par rapport au prix que j’ai payé. J’ai programmé sur mon GPS « Best Western » au lieu de « American Best Value ». Voyant mon état et mon dépit, la dame appelle sa fille, Amanda, qui m’emmène en voiture jusqu’à mon vrai motel, effectivement beaucoup moins classe. Peu importe. Je me pose groggy devant la clim, et bois tant que je peux l’eau du robinet au léger goût de Javel. Je publie le journal et les photos des 2 journées sans connexion et me rends compte qu’il faut absolument que je mange. Je n’ai rien avalé depuis la tranche de pain à mon réveil. La douche attendra, je vais manger une énorme part de frites avec un Coca géant dans le fast-food juste à côté. Il faut que j’achète de l’eau. Le seul magasin pas trop loin est un drugstore qui vend tout, des petites culottes au dentifrice, en passant par des armes à feu. Je reste béate devant l’artillerie. De quoi équiper en défense une ville ukrainienne entière. Bien sûr en libre accès aux états-unien.nes de plus de 18 ans. Cela me retourne les frites dans le ventre. Mon cubi d’eau à la main, je file tout oublier sous une douche.


Nowhere is my future.

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Lundi 24 Juillet 2023

Mercredi 26 Juillet 2023

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La publication de ce journal est soutenue par Les Tanneries - Centre d'Art Contemporain d'intérêt national à Amilly.

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