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Socorro, Nouveau-Mexique, USA
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Water Canyon Campground, Nouveau-Mexique, USA

Mardi 1 Août 2023

37,3
Kilomètres

Jour 31


La nuit a été plutôt calme, mais j’ai mis du temps à m’endormir parce que des millions de grillons faisaient un drone sonore extrêmement puissant. En me réveillant en sursaut à 2h, j’ai cru que j’avais raté mon réveil qui normalement sonne à 5h, car il faisait jour. C’était en fait la lune qui était pleine et bisquait le soleil. Je suis sortie pisser et me suis sentie microscopique devant les silhouettes des montagnes. Et terriblement seule. J’ai repris la route à 5h45. Long travelling sur le canyon pour rejoindre la désormais célèbre 60. Deux biches ont introduit ma journée. On s’est regardées un peu, il faisait trop nuit pour prendre des photos et puis elles ont bondi dans des élans d’une majesté digne des jeux olympiques du canyon, sans fric ni ostentation en jeu. Des lapins, des lièvres géants, ça court de tous les côtés. Le temps est plutôt couvert, en sortant du canyon, la lumière sur le désert est dans des tons bleus et roses, tout est pastel. Les aquarellistes seraient ravi.es. Pas de lever du soleil éblouissant ce matin, juste de la douceur, plus il monte derrière les nuages, plus tout semble de velours. Comme la 60 est loin. Quand je la retrouve il fait déjà très chaud. Il faut avaler la ligne droite sans réfléchir. Après un immense virage, la route plonge en lacets vers la petite ville de Socorro. Je vois mon premier serpent à sonnette, il est mort sur le bitume. Je suis bien heureuse de ne pas l’avoir croisé du temps de son vivant. Je vois son pote le scorpion aussi. Également macchabée (ne plus faire pipi dans les buissons). Trois heures de descente, c’est jouissif. Musique à fond. Je chante. Werner me pousse. Je suis dans le paysage. Je fais partie de lui. Mais les lacets s’enchaînent. Et pas des lacets de Dr. Martens basses, non, des 20 trous, les plus hautes. Ça n’en finit pas. Le parapluie est en scène depuis un moment. Je suis en plein désert de montagnes. Aridité suprême. Je n’ai plus d’eau quand commence la ville qui entoure une haute montagne. Un autre serpent à sonnette. Il me fait faire un pas en arrière car il a l’air vivant dans sa mort. La ville s’étire. C’est affreusement pauvre et délabré. Tout est tordu, vétuste. Quelques propriétés, cachées derrière des arbres ont l’air neuves, comme l’église, entièrement refaite. La plupart des magasins, restaurants, sont fermés pour toujours. Seules subsistent, sur l’artère principale qui mène à l’autoroute pour Albuquerque, les grandes enseignes de la consommation, McDonald’s, Walmart, Domino, Burger King, Dollar General, des stations-services et quelques motels. Je meure de faim et de soif. Je m’étais promis un repas au restaurant, ce que je n’ai pas fait depuis Palm Springs, c’est hors budget. Mais je ne m’attendais pas à une ville si décharnée. Un vieil écriteau « China Best Buffet ». Je tente. C’est miteux et les seuls plats sans viande, servis dans une barquette en polystyrène avec des couverts en plastique, sont tous jaunes fluos. Un riz immonde, des pommes de terre à l’huile, des raviolis fris remplis d’une énigme immangeable. La faim me pousse à manger au moins les pommes de terre. Je prends une chambre dans un motel habité pour la nuit par des travailleurs avec pick-ups gigantesques. C’est clean. Je pose mes affaires. Me laisse tremper dans un bain frais (oui, un bain). Je fais ensuite une escapade au Walmart, je n’ai plus rien. On découvre toujours de nouvelles perles chez Walmart. Je ne m’en lasse pas.

J’ai un budget serré pour réaliser ce projet, mais grandement vivable sans excès. Et ceci grâce à des institutions qui ont eu le courage de s’engager à mes côtés et de croire en mes pas vers Nulle part. 

Je les remercie avec toute la force que je gagne à chaque étape franchie.

Le centre d’art contemporain Les Tanneries à Amilly, qui accueillera en 2024 une grosse exposition de mes pièces et recherches autour de la marche. Merci Éric Degoutte pour ta confiance et ton exigence.

La Station Mir - Festival Interstice. Merci David Dronet pour ton soutien aveugle comme l’amour, et nos rires à l’infini.

Les Ateliers Vortex. Merci Annelise Ragno et Fiona Lindron pour votre classe, votre ténacité et notre amitié.

L’association La Belle Époque. Merci David Ritzinger, merveilleux éditeur de mes sérigraphies, pour tes bras de géant toujours ouverts.

L’Artothèque de Caen. Merci Patrick Roussel pour cette fidélité précieuse.

L’association La Grande Lessive. Merci à vous que je ne connais pas encore pour cet élan.


Nowhere is my future.

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Lundi 31 Juillet 2023

Mercredi 2 Août 2023

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La publication de ce journal est soutenue par Les Tanneries - Centre d'Art Contemporain d'intérêt national à Amilly.

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