Mangum, Oklahoma, USA
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Clarendon, Texas, USA
Lundi 14 Août 2023
21,7 + (120)
Kilomètres
Jour 44
Et paf. Fini le Texas. Suis en Oklahoma, l’État de Nulle part ! Une voiture m’a fait franchir deux abîmes d’un coup. Suis en joie. Mais cela n’a pas été simple. Cassey m’avait totalement zappée. Elle ne devait pas avoir fumé qu’une cigarette. Ne la voyant pas dans les couloirs du motel ce matin, j’ai expliqué à nouveau mon affaire à la nouvelle team de l’accueil. Sourires commerciaux. On me dit de revenir plus tard, c’est le rush. J’attends dans la salle du petit-déjeuner. La chaîne météo annonce des tornades possibles. J’ai vraiment peur des orages ici, depuis les mésaventures de l’année dernière. J’ai un léger trauma tornade tout de même. Celui de cette nuit a coupé l’électricité après un gros Babouuum. Heureusement que je ne lui marchais ou dormais pas dessous. Je n’en peux plus d’attendre au milieu des gens qui mangent du bacon surgelé grillé, des œufs en poudre et des muffins industriels aromatisés à la myrtille. Manger, depuis plus d’un mois, est vraiment un calvaire. Zéro plaisir. Juste avaler des trucs parce qu’il le faut. J’insiste au comptoir, suffisamment pour que finalement on me dise que quelqu’un va m’emmener mais contre un peu d’argent. Yes, ok, oui, merci, bravo, money is money, thanx, of course, let’s go, enfin bouger. Je démembre Werner le plus que je peux, la voiture sera petite. Cassey passe dans le couloir, me salue comme si on ne s’était jamais vues. Notre conversation d’hier a dû avoir lieu dans un monde parallèle. Linda arrive, une amie de la dame du comptoir, 60-65 ans. On prend la route vers l’Est. J’avais négocié d’aller jusqu’à Wellington, à 70 kilomètres. Là il y avait un motel miteux, mais ensuite, je devais à nouveau trouver une voiture pour 70 autres kilomètres avant une étape possible. J’ose demander à Linda si elle veut bien m’emmener plus loin. Avec un peu plus d’argent, tout est possible. Nous voilà donc parties tout droit pendant 1 heures 20 (soit 5 jours de marche), avec juste un petit décoché lorsque l’on abandonne la 287 (yessssss) qui continue vers le Sud. La conversation a du mal à prendre. Linda n’est pas causeuse. Elle a cinq chiens. Des petits formats. À la retraite, elle travaillait dans le soin à la personne. Puis elle a dressé des chiens. Elle n’a jamais quitté le Texas. Pourquoi donc, c’est énorme. Elle prend cette route pour l’Oklahoma pour la première fois. Elle s’arrête pour que je puisse faire des photos lorsque je m’extasie devant un pont métallique, et plus tard lorsque l’on passe la ligne qui finit le Texas. Me voici à nouveau en Oklahoma. Le panneau me fait un petit crochet au cœur. Lorsque je demande à Linda de me déposer au milieu de rien, avant la ville, car je veux marcher, elle me le fait répéter plusieurs fois. Are you sure ? Oh yes ! Au loin je vois les nouvelles montagnes que je vais découvrir demain. Je me sens légère. Le seul motel à des kilomètres à la ronde est aussi défraîchi que sa tenancière. C’est à l’ancienne, pas besoin de passeport, juste écrire son nom sur un papier, payer en liquide, chambre fumeur possible, clef décrochée d’un clou, la laisser dans la chambre en partant. J’adore. C’est tout pourri. Non, je n’entrerai pas dans la douche, j’en ressortirais plus sale que maintenant. Tout est poisseux. De l’eau, des tomates et des avocats dans le supermarché du village aussi délabré que le motel. J’ai hâte de reprendre la route. Demain, je campe.
Nowhere is my future.