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Magdalena, Nouveau-Mexique, USA
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Datil, Nouveau-Mexique, USA

Dimanche 30 Juillet 2023

32,3 + (28)
Kilomètres

Jour 29


L’orage n’a pas eu ma peau cette nuit, le soleil du jour oui. Aujourd’hui, c’était la première journée où je dépendais vraiment des gens. La 60 est en ligne totalement droite sur 60 kilomètres avant un soupçon d’ombre, d’eau et de logement possible, pas de réseau téléphonique, pas de transports. Il a fallu inventer.

Au réveil à 5h15, il faisait presque froid, j’ai dû sortir mon pull du fin fond de Werner, les coyotes chantaient très fort et tranquillement à la fraîche, nous avons repris la 60 mon amour. Qui directement a fendu l’horizon tout droit tout plat. Au loin, très loin, des montagnes. Mais avant, une curieuse ligne de brume. Une plaine immense, où se trouve le Very Large Array. Gigantesque radiotélescope à l’écoute du ciel et au-delà. 27 antennes paraboliques qui se déplacent sur des rails en forme de Y (deux branches de 21 kilomètres et un pied de 19 kilomètres). Autant dire qu’impressionnant est minable comme qualificatif. Mais encore fallait-il arriver aux côtés de la chose sans rissoler sur le goudron. Après 3 heures de marche, c’est à dire quand la chaleur commence sévèrement à me tutoyer, j’ai commencé à faire du stop. Mais vas-y faire du stop au bord d’une route sans circulation, et avec le mignon Werner qui ne sait pas se tenir dans une voiture « normale ». Les quelques engins qui passent m’ignorent totalement, pourtant je fais mon plus beau sourire et les salue d’un grand geste de ma casquette de basset, qui finit par un geste de torero quand ils ne ralentissent même pas. Je crie « %#%** (c’est une insulte) je suis gentille et très propre ! » à l’infini (et au-delà bien sûr). Et puis Juan ralentit, fait demi-tour exprès pour moi et on charge Werner dans le coffre du pick-up. Il fait un trajet aller-retour de Los Angeles au Texas pour livrer des trucs dans sa grosse remorque. Pour remettre en marche sa voiture, il doit souffler dans un éthylotest (et si jamais c’était positif, elle ne repartirait pas). Évidemment, il me trouve complètement dingue de marcher là et encore plus d’aller Nulle part. Il prend ma carte et une photo de moi car autrement personne ne le croira ! Il me dépose très vite car nous sommes à l’endroit où une branche du Y traverse la route et je lui dis stop stop, I want to see that. Tu es sûre, je t’arrête là ? Ouiiiiii. Et c’est magique. L’entrée officielle où tu peux faire une visite guidée de la chose est complètement de l’autre côté sur une autre route (il me faudrait marcher plus de 10 kilomètres pour atteindre le centre du site, et même chose pour en repartir). Pas besoin d’être accompagnée de touristes (et puis j’étais dans ces touristes lors d’un de mes lointains road trips), je suis seule et en silence sur une ligne de paraboles. J’observe longuement la plus proche. Elle bouge sur son axe à plusieurs reprises, la pointe qui sort de la coupole de 25 mètres fixée vers un point précis de l’univers. Elle cherche, elle écoute. C’est vertigineux. La 60 s’étire sous le soleil de midi, je reprends la marche, le Y s’étend à ma droite. La prochaine ville est encore dans 20 miles. Je n’y arriverai pas sans aide. Le temps de quelques dizaines de « **%##%$$ », enfin, enfin, un gigantesque camping-car tracté par un pick-up s’arrête. Mais très loin devant moi. Je presse le pas. Le chauffeur (Raymond) descend de son véhicule, et, alors que je suis encore loin, me demande si je ne suis pas armée. Je lui parle le plus gentiment du monde genre ben non aym frènnche (c’est une tentative écrite de mon accent qui tue) et hop Werner dans le pick-up. Raymond m’explique sa réticence par le fait qu’il y a quelques années, un ami à lui, sur cette même route, s’est fait attaquer au couteau par un auto-stoppeur qui lui a volé sa voiture. Je comprends mieux. Raymond est à la retraite, il revient de son ranch et rentre chez lui. Toute sa famille depuis des générations vit aux alentours, il pourrait conduire les yeux fermés, mais il ne le fait pas (c’est sa blague). Depuis qu’il est à la retraite, il organise des concerts, dont le prochain de Taylor Swift à Los Angeles. Je ne fais pas waw, car en fait, je ne connaissais pas la dame qui fait vibrer des stades avant de chercher pour écrire ce texte. Maintenant, je me dis que j’ai dû le décevoir ! On ne peut pas tout connaître. Autrement on serait mort. Raymond me dépose au milieu de la minuscule ville de Magdalena, posée au pied d’immenses montagnes (pffff encore) et la première chose que je fais est de filer m’acheter une nouvelle cigarette électronique (youhouhou) et de l’eau fraîche (l’eau du camping avait un drôle de goût pas bon). Il faut que je trouve où dormir. Ce n’est pas comme si j’avais le choix. Deux motels quasi l’un en face de l’autre, je prends celui qui m’inspire le plus par sa vétusté. La dame à l’accueil est adorable et la petite chambre douillette. Douche. Course (beaucoup d’eau). Et je mets la 60 en pause jusqu’à demain.


Nowhere is my future.

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Samedi 29 Juillet 2023

Lundi 31 Juillet 2023

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La publication de ce journal est soutenue par Les Tanneries - Centre d'Art Contemporain d'intérêt national à Amilly.

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