top of page

Samedi 4 Juin 2022

Lydie est un oiseau rare, un oiseau en fuite. Elle a migré avec les papillons monarques du Canada, combattu au bras de fer au Mexique, visité le Japon nucléaire et la Russie contaminée. Elle a arpenté les forêts de France et beaucoup battu le pavé. Elle a visité les zoos, elle a fait des road-trips, elle a campé. Elle a échoué Psyché sur les sites toxiques du monde entier et cueilli des plantes pour mieux éprouver celle de son pied. 

Lydie Jean-Dit-Pannel n’est ni une artiste d’atelier, ni une artiste nomade. C’est une baroudeuse, et une déterminée. Sa marche participe à la fois d’un processus de création, d’une performance, d’un récit de soi et d’un geste micro-politique. À son moyen, elle nourrit sa lutte contre l’hybris de ses contemporains et mène une campagne acharnée pour sensibiliser aux ravages des sociétés industrielles ou réaffecter notre rapport à l’environnement naturel. En creux, il s’agit toujours d’éprouver, par le seul déplacement, les limites des territoires autorisés, de ce qu’il nous est permis de voir et de pénétrer, cherchant à atteindre la lisère de ce qui ne l’est pas. À l’aune des espaces policés, elle s’est confrontée aux grilles et à leurs caméras, elle a touché des barrières, parfois bravé l’interdit, elle s’y est faite souvent recaler mais qu’importe : contre le bruit des bottes, Lydie presse le pas.

La baroudeuse a le sens du but à atteindre et le goût du chemin qui y mène. Son plan en tête, elle prend la route comme si elle lui appartenait, parcourant villes, déserts et forêts. Du péri-urbain à la terre agricole, du plat bitume aux sentiers escarpés, elle endosse tour à tour les rôles d’arpenteuse, d’exploratrice, de globe-trotter, de flâneuse et de wanderer. De vagabonde aussi, de celle qui éprouve son mental à la force, sinon à la rage, de ses mollets. Son chemin est une traversée de paysages, de climats et de biotopes qui défilent sous ses yeux comme ils s’enchaînent dans son esprit. Dans son carnet de route, ses notes sont aussi courantes que sa pensée est mobile, sa langue roule, glisse et s’évade. Elle bute aussi parfois. Il en va au fond de la marche et de l’écriture comme de la vie : on alterne les chutes et les relèves pour mieux filer droit. 

 

Fille de la beat generation, complice d’Herzog, Lydie Jean-Dit-Pannel conquiert sa liberté dans la solitude de son pas. Do not disturb, surtout pas. Le temps de la marche vaut pour introspection, il accompagne une immersion dans la nature qui ouvre sur une plongée en soi. Elle s’évade vers des destinations aux noms d’utopies qui seules peuvent accueillir son être esseulé. Au bout du monde, Quelque part, Nulle part : sa topologie est une poésie absurde, teintée d’une ironie nihiliste. Elle veut toucher à son non-but, marcher à contre-courant et remonter le fil, envers et contre tous, quitte à tourner en rond sur une escarpolette. Sur sa trajectoire, aucune direction n’est imposée. Elle trace sa route comme on dessine une ligne de vie, sans toujours savoir quel sens on va lui donner.

Florian Gaité,

La Baroudeuse (octobre 2021)

1-logo1-TRANS-2-Revers.png

<

Jeudi 12 Mai 2022

Dimanche 5 Juin 2022

>

1-logo1-TRANS-2.png

La publication de ce journal est une commande du FRAC Bourgogne dans le cadre de son projet sur le récit et ses formes.

Fondation Antoine de Galbert
FRAC Bourgogne
Artothèque de Caen
Station Mir ・ Festival ]Interstice[
Maison des arts - centre d'art contemporain de Malakoff
Association La Belle Époque
bottom of page